Constructibilité pour plus de 5000 nouveaux habitants à Paimboeuf et Très-la-Grange. Outre le bétonnage de plusieurs dizaines d’hectares, combattus pas l’actuel maire au temps où il s’opposait au précédent, la zone naturelle de part et d’autre de la partie basse de l’Allée de la Tire disparaît pour faire place à la ZAC. Par ailleurs, la hauteur des immeubles n’est clairement définie ni dans le projet de ZAC ni dans le futur PLU ! D’où la grande inquiétude des voisins.
On voit sur ce document l’implatation des immeubles sur Paimboeuf (à droite) mais rien encore sur Très-la-Frange (à gauche). L’art de saucissonner pour mieux faire passer la pilule…
Habilement, la Ville de Ferney a délégué cet immense projet à la Communauté de Communes du Pays de Gex, qui a soumis son projet à l’enquête publique avant la présentation du PLU ferneysien!
Conjointement avec l’association Vivre à Ferney, nous avons déposé dans le cahier du commissaire-enquêteur le texte ci-desous, dont vous pouvet également télécharger le PDF ici: Observations ZAC Paimboeuf
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Projet Stratégique de Développement
Ferney-Voltaire
Zone d’Aménagement Concerté
Les présentes observations sont formulées conjointement par deux associations ferneysiennes engagées dans l’urbanisme, l’environnement et la qualité de vie, Vivre à Ferney et Ferney dans la rue. Elles seront déposées simultanément à Ferney-Voltaire, commune à l’initiative de ce projet, et au siège de la Communauté de Communes du Pays de Gex (CCPG), auteur officiel de l’étude.
A ce propos, nous considérons que la procédure d’enquête est déloyale.
De manière générale, nous nous opposons à ce projet pour des raisons de morale politique, de déséquilibre social, d’atteinte au patrimoine et de mise en danger de l’environnement.
- 1. Procédure d’enquête
Le document soumis à l’enquête représente plusieurs centaines de pages et plusieurs dizaines de plans. Pour les consulter avec attention, plusieurs heures étaient nécessaires. A Ferney, ce lourd document est présenté sur une table mal éclairée, dotée d’une seule chaise. Il nous a fallu insister pour que soit améliorée cette situation mais, de toute manière, les horaires et conditions (un seul exemplaire) n’auraient pu permettre à un nombre suffisant de citoyens une étude en profondeur.
Il est désormais courant de doubler la traditionnelle mise à disposition par une mise en ligne des documents ou la remise d’une clé USB permettant une meilleure étude à domicile, en particulier en-dehors des heures d’ouverture des services publics. C’est en particulier ce qui se produit en ce moment même pour l’enquête publique sur le PLU de Ferney-Voltaire.
Or, consultés par téléphone, les services de la CCPG ont confirmé que ce document électronique existait mais qu’il ne pourrait être mis à la disposition du public qu’après la fin de l’enquête. Il s’agit là d’une obstruction grave et volontaire, empêchant d’effectuer en toute sérénité et en tout temps une consultation approfondie du document d’enquête.
Nous demandons donc que ces documents soient immédiatement mis en ligne et que le délai d’enquête soit repoussé d’autant.
La présente étude fait nommément référence à un PLU qui n’a pas encore été soumis à étude ni a fortiori mis en vigueur (cf. p. 43 du rapport de présentation). Il est donc, de fait, dénué de tout fondement juridique, en particulier parce qu’il ne peut préciser la hauteur maximale des immeubles, etc.
La grande précipitation de ce projet présenté comme « stratégique » peut sembler incompréhensible mais elle n’est sans doute pas étrangère à la tenue prochaine des élections municipales (mars 2014), dont le résultat pourrait remettre en cause les choix de l’actuelle municipalité.
Enfin, pourquoi la Ville de Ferney-Voltaire s’est-elle déchargée de ce projet de ZAC sur la CCPG alors qu’il concerne spécifiquement cette seule commune ?
- 2. Morale politique
Avant d’être à la mairie de Ferney-Voltaire, le maire actuel s’est longuement impliqué dans la vie locale, d’abord comme adjoint au maire, ensuite comme président d’une association (Ferney-Avenir).
Comme adjoint chargé de l’urbanisme, il a été l’auteur de la création d’une Zone de protection patrimoniale liée à l’héritage de Voltaire. Cette zone protégeait et sanctuarisait en particulier les terrains alors agricoles concernés par la ZAC présentée aujourd’hui.
Comme président de Ferney-Avenir (devenue Ferney-à-Venir en vue d’échéances électorales), il a pris fortement position pour que le Plan d’Exposition au Bruit (de l’aéroport voisin) soit élargie jusqu’aux rues de Meyrin et Versoix, ce qui aurait de facto empêché la construction de toute nouvelle habitation dans la zone concernée par l’actuelle étude. Il a par ailleurs vivement et publiquement combattu le projet du maire précédent, visant à permettre à long terme des constructions dans cette zone.
Cette position était encore la sienne lors de la campagne électorale qui l’a porté au pouvoir. On peut donc considérer que, pour partie, il a été élu pour maintenir Paimboeuf et Très-la-Grange en zone agricole.
- 3. Déséquilibre social
Dans une cité comme Ferney-Voltaire, dont l’équilibre social est fragilisé par des circonstances particulières (disparités salariales entre la France et la Suisse, phénomène frontalier, etc.), l’apport massif d’un si grand nombre d’habitants (à terme, 2550 logements soit plus de 5000 nouveaux habitants) créera un lourd déséquilibre.
Ce déséquilibre va à l’encontre de souhaits et de projets avancés par la Ville et par la CCPG dans le but de rééquilibrer habitat et emploi (actuellement, le Pays de Gex est une zone dortoir pour des personnes dont l’emploi se trouve majoritairement en Suisse). Or, Paimboeuf prévoit 65% de logements et Très-la-Grange 77%. A contrario, la cité suisse voisine du Grand-Saconnex, avec laquelle Ferney est censée développer un projet commun de rééquilibrage, prévoit 600 logements seulement et 1400 emplois. A noter que la ZAC ferneysienne ne spécifie aucun chiffre d’emplois nouveaux.
- 4. Atteinte au patrimoine
Les zones concernées (Paimboeuf et Très-la-Grange) font historiquement partie du patrimoine voltairien de la ville de Ferney-Voltaire. A ce propos, l’actuel maire avait présenté et fait adopter, alors qu’il était maire adjoint à l’urbanisme, un plan général de protection de ce périmètre voltairien.
- 5. Activités agricoles et environnement
Selon le rapport (étude d’impact p. 14), La ville est entourée de paysages agricoles et bocagers soulignés par les massifs montagneux qui offrent des vues lointaines. Ces paysages caractéristiques des lieux sont à préserver et valoriser.
Or, l’urbanisation de cette zone, en contradiction avec cette recommandation, constituerait une atteinte grave et irréversible à ces paysages.
De plus, selon la même étude, les prospections naturalistes ont mis en évidence la présence d’espèces rares et protégées.
Quelles garanties sont-elles données pour la préservation de ces espèces ?
Ces deux zones, et en particulier Paimboeuf, présentent un risque élevé d’inondation. Ce danger n’est pas suffisamment pris en compte.
De très importantes terres agricoles seront supprimées. Le rapport prétend que des surfaces équivalentes seront acquises et mises à disposition des exploitants. Où ? Dans quelles conditions ? De toute manière, les terres agricoles de substitution ne pourront être que des terres qui sont, aujourd’hui déjà, exploitées. En termes de surface, il y aura donc forcément un important déficit.
- 6. Accès et circulation
Il y a une évidente contradiction entre une telle augmentation de population, entraînant des besoins important en accès routiers et en stationnements automobiles, et la volonté affichée de déplacements doux. Le projet prévoit un nombre notoirement insuffisant de parkings. Leur emplacement n’est pas compatible avec l’implantation de la plupart des immeubles (vie quotidienne, provisions, visites, personnes âgées). Cette conception répond au credo du maire, pour lequel la population doit se déplacer à pied, à vélo ou à trottinette. Belle utopie, qui ne correspondra pas aux besoins réels des futurs habitants. Ceux-ci auront à souffrir de nombreuses restrictions entraînant en particulier l’isolement du quartier par rapport à l’extérieur.
De fait, les accès routiers seront problématiques. Deux sont prévus, dans des voies exiguës ou encore inexistantes utilisant le réseau ancien du centre-ville. Un accès direct sera-t-il possible sur la RD 35 de contournement ? Si oui, il rendra plus difficiles encore les flux pendulaires quotidiens. Si non, l’accès automobile des futurs habitants sera encore plus problématique.
Selon nos informations, la mise en place d’un Bus à Haut Niveau de Services (BHNS) puis éventuellement d’un tram reliant Ferney à Genève et/ou Meyrin serait conditionnée, par le Conseil Général de l’Ain et les Transports Publics Genevois (TPG) à une forte augmentation de la clientèle. N’est-ce pas, prioritairement, le but recherché par ce si importantes et si rapides augmentations de la population ?
- 7. Equipements sociaux
Une crèche de 45 lits pour une population de près de 4000 habitants, empêchés par les difficultés automobiles d’amener leurs enfants vers des lieux d’accueil extérieurs, ce n’est pas sérieux.
D’autres équipements publics sont prévus (école, etc.). Seront-ils suffisants ? Comment et pour qui seront-ils accessibles ? Qui les financera ?
- 8. Qualité de vie
La proximité de l’aéroport de Genève, dont le trafic augmente de manière exponentielle, n’est pratiquement pas prise en compte. Le bruit des avions ne permet pas de jouir pleinement des beaux jours.
De plus, une récente étude suisse montre que 30% du gaz carbonique (CO2) du canton de Genève proviennent déjà du trafic aérien. Ce quartier de Ferney, situé sous les vents dominants d’ouest, sera directement affecté par cette pollution, qui risque d’obliger les habitants à rester confinés dans leur logement.
- 9. Conclusions
Les observations et objections énoncées ci-dessus sont forcément partielles, l’étude complète du document d’enquête étant matériellement impossible dans les lieux et conditions de sa mise à disposition du public.
Cependant, les points évoqués ci-dessus méritent plus que l’indifférence, le silence ou le mépris. Nous attendons qu’ils soient pris en compte.
En tout état de cause, il nous semble impossible et illégitime d’asseoir l’étude d’une ZAC aussi importante sur les règles d’un PLU qui n’a pas encore été mis à l’enquête ni, a fortiori, promulgué.
Dans ces conditions, nos deux associations se réservent la possibilité de porter cette affaire devant les tribunaux administratifs.
A Ferney-Voltaire le 24 octobre 2013.
Vivre à Ferney, le président (Carl Freeman)
Ferney dans la rue, le président (Alex Décotte)