Notre position

 

Voici le texte du document final rédigé par notre association pour être déposé le 10 mai 2010, dernier jour de l’enquête publique, à la mairie de Ferney-Voltaire.

 

Ferney dans la rue
Association Loi 1901
15 Avenue du Jura
01210 Ferney-Voltaire

A Monsieur le Commissaire-enquêteur
Plan Local d’Urbanisme
Mairie
01210 Ferney-Voltaire

Ferney le 10 mai 2010

Monsieur le commissaire-enquêteur,

Les statuts de notre association prévoient en particulier de « réagir à toute situation créée, projetée ou seulement possible dans la commune de Ferney-Voltaire, le Pays de Gex et le bassin lémanique, dans les domaines suivants :
– Urbanisme prospectif, réglementaire et opérationnel dont l’application du droit des sols,
– Milieux naturels et agricoles, cadre de vie et environnement, y compris pour tout fait ou risque, notamment de pollution et de nuisances qui serait de nature à affecter l’environnement de la commune de Ferney-Voltaire, du Pays de Gex et du bassin lémanique ;
– Protection, sauvegarde, mise en valeur et réhabilitation du patrimoine, des monuments historiques, des paysages, des sites naturels et construits, protégés ou non … »

Dès l’arrêt et la communication publique (décembre 2009) du PLU actuellement mis à l’enquête, nous nous sommes réunis à de très nombreuses reprises pour étudier les avantages et les inconvénients que présente, à notre sens, ce plan pour l’avenir de notre cité, le respect de son patrimoine environnemental et culturel, la cohésion sociale de ses habitants, présents ou à venir. Nous avons également participé aux différentes séances d’information organisées par la mairie. Ces rencontres nous ont hélas confirmés dans notre impression de flou artistique et de double langage.

Certains aspects de ce plan nous semblent néanmoins positifs. Nous n’y reviendrons pas. D’autres présentent en revanche des dangers pour notre cité mais pourraient nous agréer, sous réserve d’importantes modifications. D’autres enfin porteraient une atteinte grave et irrémédiable à notre cadre de vie et à notre avenir. Nous demandons à Monsieur le commissaire-enquêteur de prendre en compte ces différents points et de les exprimer dans le rapport qu’il devra remettre au maire et à son conseil municipal. Nous espérons alors être entendus à l’issue de ce processus mais, dans le cas contraire, nous n’écartons pas de porter un ou plusieurs des points litigieux devant les tribunaux.

Voici les points sur lesquels les membres de notre association se sont prononcés à l’unanimité des présents:

1. Cimetière et alentours : construction d’immeubles d’habitation et d’une voie automobile traversante.

Nous nous opposons à ce projet pour 3 raisons :

1. Il empêchera à jamais tout agrandissement du cimetière et compromettra donc le droit légitime des Ferneysiens de se faire enterrer dans leur commune (impossibilité de créer un autre cimetière ailleurs, pour cause de nappe phréatique).
2. Il porte une atteinte irrémédiable à l’environnement et au patrimoine voltairien en obstruant le lien visuel direct entre le château de Voltaire et les maisons qu’il a fait bâtir au bord de la rue de Gex.
3. La création d’une voie automobile débouchant sur l’allée du Château rendra à jamais impossible sa transformation en allée piétonne, souhaitée par la population, souhaitable pour le patrimoine voltairien et déjà projetée par les précédentes municipalités.

2. Quartier du Bijou / Maison des Cultures / Cinéma

Nous ne nous opposons pas à l’implantation d’une zone culturelle forte et viable au centre de Ferney. Nous y sommes au contraire favorables mais ne pouvons souscrire à des choix risquant de compromettre la viabilité du projet, de déséquilibrer le quartier et de créer des nuisances et frictions insupportables. Notre opposition porte sur les points suivants :

1. Il est inacceptable, incompréhensible et sans doute illicite qu’un projet aussi important, dans une zone aussi stratégique de la cité, soit traité avec autant de flou et de désinvolture. Alors que d’autres quartiers sont définis avec une extrême précision (implantation de chacun des immeubles, etc.), celui-ci ne fait l’objet que de quelques vagues ovales de couleur assortis de textes tout aussi imprécis. Pour adhérer à un tel projet, la population doit en connaître avec précision les éléments constitutifs, leur lieu d’implantation, leur interaction entre eux et avec les quartiers périphériques.
2. Caché derrière la barre d’un supermarché, le projet manque d’accès et de visibilité depuis l’avenue Voltaire, principal axe de passage au centre de la cité. Les manifestations culturelles (théâtre, musique, cinéma, etc.) risquent de ce fait d’être amputées d’une partie importante de leur public naturel. La conséquence pourrait en être la faillite inéluctable du cinéma (privé) et une gestion exagérément coûteuse des activités culturelles.
3. L’accumulation d’activités (culture, habitat, etc.) sur une surface si restreinte, desservie par une voie de faible débit et d’accès limité, la destruction d’une partie des parkings actuels et leur remplacement notoirement insuffisant au regard des futures activités compromet l’économie du quartier, la viabilité du projet culturel et le bien-être légitime des habitants du quartier, présents ou à venir. A cet égard, nous renvoyons à la publication, en dernière page du bulletin municipal (mai 2010), d’une déclaration de M. Arnaud Berthier, conseiller municipal délégué à l’urbanisme, aux transports et à l’environnement, selon laquelle la commune prévoit pour ce projet « un parking d’une centaine de places ».

Or, pour le seul cinéma (1100 à 1200 places assises) et selon le ratio communément admis, un minimum de 300 places de parking est nécessaire (sans compter les autres activités et la création de deux immeubles d’habitation). Même si la commune espère l’accès au parking souterrain du centre commercial voisin (79 places), on est loin du compte. Il y a fort à parier que la clientèle du cinéma tentera de stationner sur les parkings privés du quartier résidentiel, tout proche, du Bijou, avec les frictions inévitables que cela entraînera. Et avec, à terme, la désaffection du public, découragé par ces difficultés d’accès au cinéma et à la culture.

Ces différents arguments ont toutes les chances d’être entendus par un tribunal et de compromettre pour longtemps la réalisation d’un projet plus cohérent, moins entassé, plus ouvert sur la cité, moins contraignant pour le voisinage et englobant dès sa conception l’actuelle zone du supermarché.

3. Paimboeuf et Très-la-Grange

Un tel projet, même s’il est officiellement prévu à moyenne échéance, peut se réaliser très rapidement. Il suffit pour cela d’une simple décision du conseil municipal et d’une enquête moins exigeante que celle d’un PLU. Ce classement de constructibilité à terme figurait effectivement dans le PLU de la municipalité précédente, aussitôt annulé par l’actuelle équipe après son adoption, mais aucun projet n’y avait encore été ébauché. Rien n’empêcherait donc le PLU actuel de revenir sur ce classement, surtout dans la mesure où l’actuel maire s’était, avant son élection, fortement et publiquement battu pour que cette zone soit interdite à toute forme d’habitat. Avec l’association qu’il présidait (Ferney-à-Venir), il était intervenu à plusieurs reprises auprès de l’Etat pour que la ligne du PEB (bruit) soit plus restrictive en empêche, de fait, la construction de tout logement dans cette zone. Par ailleurs, dans un courrier adressé à un riverain de Paimboeuf, il écrivait en 2007, au nom de cette même association, que la disparition de ces espaces agricoles serait « une catastrophe environnementale et culturelle » (*voir pièce jointe).

Nous nous opposons à ce projet pour les raisons suivantes :

1. Il détruit entièrement et définitivement un très grand ensemble naturel et patrimonial (domaine de Voltaire) essentiel à l’environnement, à l’identité et à l’équilibre de la cité.
2. Il est contraire aux prises de position et engagements publics pris par l’actuel maire au cours des années précédentes et lors de sa campagne électorale.
3. Dans la mesure où il permettra l’implantation de 1500 logements et la venue de 3 à 5.000 habitants dans une commune qui en compte actuellement moins de 10.000, il n’est pas conforme au SCOT (schéma de cohérence territoriale) du Pays de Gex, qui s’impose aux communes et limite la croissance annuelle de la population à 2,5%. Cette limite sera d’autant plus gravement franchie que, parallèlement, le PLU prévoit la construction de très nombreux logements nouveaux dans d’autres parties de la ville.

4. Quartier du Levant

La démolition des bâtiments actuels et la reconstruction d’immeubles plus grands et plus confortables est peut-être souhaitable mais certainement pas obligatoire, surtout si elle crée pour les habitants une longue période d’inquiétude et le risque de devoir quitter leur quartier. Il y a donc là un risque d’atteinte grave à la cohésion sociale de la ville. Cette inquiétude pourrait être levée si, préalablement à toute décision et à toute transformation, la garantie écrite était donnée, conjointement par la mairie et le propriétaire bailleur (Dynacité) que TOUS les habitants délogés auront le droit à être relogés dans le même quartier, dans des logements de même surface et à des loyers analogues. A ce jour, malgré plusieurs réunions publiques, cette garantie n’a été ni donnée ni même envisagée.

5. Ruelle des Jardins

Alors que les réserves de propriété portent généralement sur des zones non construites afin d’y prévoir le passage de voies publiques, ce sont ici deux maisons d’habitation et leurs jardins, ainsi que des garages et le parking privé d’un établissement commercial, qui sont touchés par une très large réserve de propriété, d’autant plus injustifiée qu’elle ne correspond à aucune nécessité ni aucun projet précis. Le PLU fait seulement état d’une volonté de « réaménagement ». Lequel, comment, dans quel but ? Mystère.
Nous nous opposons donc à ce classement, qui ne correspond à aucun besoin identifié, crée une grave inquiétude parmi les habitants, compromet l’évolution et l’embellissement de leur bien et pourrait permettre l’élargissement et l’augmentation du trafic automobile dans une voie étroite (Rue Condorcet) initialement conçue pour le seul trafic local.

Cohésion sociale de la cité

Les très nombreux contacts que nous avons eus avec des habitants de tout âge, toute origine, tout quartier et toute situation familiale ont fait apparaître une très forte inquiétude quant à leur avenir familial et à celui de la cité. Beaucoup considèrent que des changements aussi considérables auraient sur l’équilibre de la cité des conséquences graves, néfastes et, pour la plupart, irréversibles. Un plan d’urbanisme doit se faire au bénéfice des habitants, actuels et à venir, et pas à leur détriment. De plus, la création de très nombreux logements nouveaux, sans augmentation proportionnelle des équipements publics – absents ou à peine mentionnés dans le PLU – (écoles, crèches, activités sportives), aurait inévitablement des conséquences néfastes sur la vie de chacun et la cohésion de tous.

Ces craintes n’ont pu s’exprimer qu’avec difficulté dans la mesure où les « réunions d’information » se sont généralement déroulées à sens unique, très longues interventions du maire, des élus et des « techniciens » engagés pour la réalisation du PLU. Nombre d’éléments du PLU n’étant pas conformes aux engagements pris lors de la campagne électorale, une méfiance malsaine s’est installée dans la population à l’égard de la municipalité élue. Cela mine et risque de miner davantage encore la nécessaire cohésion sociale.

Aux dernière nouvelles, qu’il sera facile de vérifier a posteriori lors de la rédaction finale du commissaire-enquêteur, le maire et son équipe auraient planifié une ou plusieurs réunions publiques, avant la fin du mois de juin, pour renter de rassurer la population. Ce serait bien la preuve que les réunions précédentes, entre l’arrêt du PLU et l’ouverture de l’enquête publique, n’ont pas réellement informé les Ferneysiens et n’ont pas entendu leurs craintes.

Par sa situation géographique, son histoire, son patrimoine voltairien, la qualité de son architecture du XVIIIe siècle et la beauté préservée d’une partie importante de son environnement naturel, Ferney-Voltaire est un joyau que les responsables actuels se doivent de préserver au profit des générations à venir. Nous avons le sentiment que tel n’est pas le cas – et de beaucoup s’en faut – de ce PLU.

Par l’extrême diversité de ses habitants et le patient apprentissage qui a permis aux uns et aux autres de partager l’âme, l’histoire et la fierté leur cité, Ferney-Voltaire bénéficie d’une harmonie sociale exemplaire mais fragile. Des changements aussi brutaux que ceux que prévoit le PLU pourraient mettre en péril, pour longtemps ou pour jamais, la qualité de la vie locale. Notre rôle est de mettre en garde les responsables politiques contre de tels excès et de telles dérives. Tel est le sens de la présente démarche.

Pour Ferney dans la rue, son conseil d’administration :

Alex Décotte, président ;
Jean-Jacques Odier, secrétaire ;
Malika Bekhti, trésorière,
Sylvie Dupont, trésorière-adjointe.

*NB: Le texte remis à la mairie comporte également des documents et illustrations dont la plupart se trouvent déjà sur le présent site. Nous y avons joint les statuts de notre association.

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